Dette et inflation - L’œuf ou la poule ? Part.1 (Nicolas Teterel)
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Nicolas Teterel nous fait le plaisir d’être l’invité du blog StackinSat. Nicolas est journaliste et essayiste spécialisé dans la révolution Bitcoin. Ses papiers traitent du bitcoin à travers les prismes géopolitiques, économiques et libertaires.
Vingt-et-un millions de bitcoins armés d’un mur d’énergie chiffrée. Et pas un de plus. Cette masse monétaire absolument finie offre à l’humanité un refuge cybernétique contre l’inflation.
Au fait, d’où vient l’inflation ?
Elle provient d’un déséquilibre entre l’offre et la demande.
Offre = Production de tout ce qui s’achète
Demande = Quantité d’argent en circulation
Côté demande, personne ne peut nier que la quantité d’argent est en constante expansion. La dette publique américaine est par exemple passée de 17 milliards de dollars en 1929 à 30 000 milliards aujourd’hui.
En France, elle est passée de 400 milliards (d’euros) en 1980 à près de 3 000 milliards aujourd’hui. Soit une hausse de 650 % en quarante ans. En sachant que la population n’a augmenté que de 20 % dans le même temps.
Même constat au niveau de la dette des particuliers. L’encours des prêts immobiliers atteint 1500 milliards en France, contre 300 milliards en l’an 2000. Soit une augmentation de 400 % en vingt ans à peine. Et ne parlons pas de la dette des entreprises.
La quantité d’argent en circulation étant exactement égal à la dette, il est difficile de nier sa rapide expansion au cours des années.
[Seuls les billets et les pièces ne sont pas émis à partir d’une dette. Mais ils ne représentent que 5 % de la masse monétaire.]
Milton Friedman disait que « l’inflation est toujours un phénomène monétaire en ce sens qu’elle est et qu’elle ne peut être générée que par une augmentation de la quantité de monnaie plus rapide que celle de la production ».
La fin de cette citation est importante ! Si la quantité de choses que nous produisons augmente proportionnellement à celle de la quantité d’argent en circulation, le pouvoir d’achat devrait rester globalement stable. Malheureusement, ce n’est plus le cas depuis longtemps.
La production (l’offre) est loin d’avoir eu la même trajectoire que la dette au cours des vingt dernières années. C’est ce que nous apprend le PIB réel français qui n’a augmenté que de 30 %. Pire, le PIB réel par habitant n’a progressé que de 12 %...
Pour rappel, le PIB a une définition très précise : il s’agit du « résultat final de l’activité de production ». Il mesure en gros l’évolution de la production d’un pays. On le calcule en additionnant tout ce qui a été vendu au cours de l’année. Le PIB « réel » signifie PIB en « volume », c’est-à-dire sans prendre en compte l’inflation.
Et oui, l’inflation gonfle artificiellement le PIB. Un PIB qui grossirait par le seul effet de l’inflation reflète en réalité un appauvrissement de la population. Le PIB réel est donc plus approprié pour connaître la véritable production d’un pays.
Le PIB réal représente l’offre. Et si l’offre n’évolue pas en tandem avec la quantité de monnaie dans l’économie, vous obtenez de l’inflation. À moins de recruter des armées d’esclaves asiatiques… Nous y reviendrons.
Avant ça, ajoutons que l’inflation officielle est loin du compte. Les artifices comptables permettant de camoufler l’appauvrissement réel de la population sont nombreux.
Vous serez notamment surpris d’apprendre que les achats immobiliers ne font pas partie du calcul d’inflation. Seuls les loyers sont comptabilisés ! Résultat : les dépenses de logement ne représentent que 6 % du panier de l’INSEE. Mais qui dépense seulement 6 % de ses revenus pour se loger ?...
Autre aberration : le fameux effet « innovation ». Par exemple, sous prétexte que leur puissance augmente, les ordinateurs ne coûtent qu’une cinquantaine d’euros dans le monde imaginaire de l’INSEE.
En d’autres termes, l’indexation des salaires ou des retraites sur l’inflation n’est même pas suffisant pour maintenir son pouvoir d’achat puisque les prix grimpent bien plus vite qu’annoncé.
Maintenant que les bases sont posées, posons la question : Est-ce l’offre (production) ou la demande (quantité d’argent en circulation) qui provoque de l’inflation ? Les deux ? L’une plus que l’autre ?
De manière assez contre-intuitive, il y a de bonnes chances que ce soit surtout la partie offre de l’équation qui soit la première responsable de l’inflation.
Une manière de s’en convaincre et d’observer l’évolution de la production par français. Cette dernière s’est fortement tassée à partir du pic de pétrole conventionnel de 2007 et coïncide avec une explosion de la dette publique, passant de 60 % du PIB à quasiment 120 % aujourd’hui. Pareil aux États-Unis.
Là où je veux doucement en venir, c’est que dans cette histoire d’inflation, la création de monnaie n’est pas l’œuf, mais la poule.
La deuxième partie de ce billet sera publiée très bientôt.