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Du Fiat Standard vers le Bitcoin Standard, chronique d’une Renaissance économique - Partie 2

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Théo Mogenet est le fondateur de l'Institut Bitcoin. Cette semaine Théo publie son second article "Bitcoin ou Fiat, semer ou manger la graine ?".

Du Fiat Standard vers le Bitcoin Standard, chronique d’une Renaissance économique - Partie 2

Temps de lecture : 6 minutes ⌛

2. Bitcoin ou Fiat, semer ou manger la graine ?

Théo Mogenet est Professeur à Kedge Bordeaux, enseignant Bitcoin et des théories économiques de l'École Autrichienne, mais aussi fondateur de l'Institut Bitcoin. Cette semaine Théo publie sur notre blog, son second article "Bitcoin ou Fiat, semer ou manger la graine ?". Il est extrait d’une série intitulée “Du Fiat standard vers le Bitcoin standard, chronique d'une renaissance économique”.

Une fois la récolte effectuée, l’agriculteur se trouve face à un choix : soit il vend toute sa récolte et maximise ainsi ses revenus sur le court terme, soit il en garde une portion qu’il sèmera ensuite pour garantir les récoltes à venir. Idem, lorsqu’il envisage son exploitation, il peut exploiter la surface totale de son champ mais risquer que la terre s’appauvrisse d’ici quelques années, ou laisser une partie de son champ en jachère et ainsi s’assurer qu’il disposera demain d’une terre riche et meuble.

Dans un cas comme dans l’autre, il doit arbitrer entre la maximisation de ses revenus à court-terme et la longévité du stock de capital productif dont il dispose (sa terre). In fine, cette décision dépend de sa valorisation relative du présent par rapport au futur, ou ce que l’on appelle ses préférences temporelles.

En matière économique, le contexte qui guide nos arbitrages intertemporels, c’est essentiellement le taux d’intérêt réel : si je sais que l’argent que j’ai maintenant achètera moins de choses demain, je serais plus enclin à consommer ou à m’endetter qu’à épargner. Par conséquent, le taux d’intérêt réel, qui représente la récompense offerte à l’épargnant pour le report de sa consommation immédiate, détermine directement notre propension à épargner plutôt qu’à consommer.

En ce qui concerne notre agriculteur, et plus généralement l’ensemble des producteurs dans notre économie, le régime de taux d’intérêt affecte les arbitrages intertemporels parce qu’il détermine la valeur actuelle des revenus futurs attendus.
Si l’agriculteur peut espérer 10.000€ de sa production annuelle et que le taux d’inflation est de 10%, alors la valeur présente des 10.000€ perçus la dixième année est d’environ 3850€. Aussi, il est évident que l’agriculteur sera incité à maximiser le revenu présent de sa terre, en le portant par exemple à 15.000€, même si cela implique qu’elle ne puisse plus porter aucun fruit d’ici 20 ans.

A l’inverse, si le taux d’inflation n’est que d’1,7% (taux d’inflation actuel de bitcoin), 10 000 sats perçus dans 10 ans ont une valeur actuelle de 8500 sats. Dans ce cas, l’agriculteur n’a plus tant intérêt à maximiser sa production à court-terme, surtout si cela risque de mettre en péril les récoltes futures.

Le rehaussement des préférences temporelles est un phénomène extrêmement préjudiciable pour une société puisque cela revient à inciter les agents économiques à consommer le stock de capital plutôt qu’à l’entretenir et l’accroître, c’est-à-dire à maximiser la consommation présente au détriment de la production future.

Tout agriculteur digne de ce nom, sait que sa terre est son bien le plus cher, et qu’il court à sa perte s’il ne la ménage pas. Pourtant, comme le régime fiat détraque les incitations sous-jacentes, notamment le long de la flèche du temps, en l’encourageant à se concentrer sur les revenus de court-terme au détriment de l’entretien du stock de capital à long-terme, il ne peut agir selon ce que lui dicte le bon sens.

S’il lui prenait de tenir son exploitation comme ses ancêtres l’ont fait durant des générations, il se trouverait un investisseur qui profiterait du crédit facile pour racheter son champ, maximiserait les rendements à court-terme et bénéficierait ainsi d’un retour sur investissement très alléchant. Du fait de l’effet de levier inhérent à l’opération, l’investisseur pourrait d’ailleurs se permettre d’offrir un prix suffisamment élevé pour que l’agriculteur ne puisse le refuser.

De fait, ce phénomène de consommation de capital ne peut pas vraiment être enrayé par les volontés individuelles (ou le bon sens) ; les incitations fournies par le fiat garantissent que la terre finira par être surexploitée et détruite.

Contrairement à ce que prétendent les journalistes ignorants ou les contempteurs du capitalisme, ceci n’a rien d’une fatalité. La consommation aveugle de capital n’est pas une conséquence du « libéralisme », mais bien du régime de monnaie facile qui nous incite à délaisser l’épargne et l’accumulation de capital au profit de sa consommation. Sur un standard monétaire dur, comme l’or ou Bitcoin, l’inflation est minimale, si bien que la valeur présente des revenus futurs est élevée, tout comme l’est l’incitation à entretenir et accroître le stock de capital.

L’économie fiat c’est mesurer la richesse à l’aune de la consommation de ressources. Il n’est donc pas étonnant qu’un tel régime monétaire ait consacré le PIB comme métrique reine pour mesurer la santé d’une économie. Il m’est difficile d’imaginer quelque chose de plus stupide et dangereux : collectivement, le fiat nous conduit à être cet agriculteur qui consomme toute sa récolte et est satisfait de lui parce qu’il a « maximisé ses revenus » alors même qu’il mourra de faim dans un an.

La distorsion des préférences temporelles par le fiat n'entraîne rien d’autre qu’un phénomène de dé-civilisation. Il est grand temps de mettre à jour notre système monétaire et de revenir à un monde où l’on est incité à semer la graine plutôt qu’à la manger.

Théo Mogenet,
PDG et fondateur de l’Institut Bitcoin,
Le 15 juillet 2022

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